Pakistan : un an après Jaranwala, les chrétiens attendent toujours justice.
Un an après les attaques contre la communauté chrétienne de Jaranwala, au Pakistan, la justice reste hors de portée. Le gouvernement pakistanais n’a pas tenu ses promesses de traduire les coupables en justice et d’indemniser les victimes. Les minorités religieuses continuent de subir l’impunité et les discriminations, ce qui compromet leurs droits.
Contexte des attaques
Le 16 août 2023, une foule a attaqué plusieurs quartiers chrétiens de Jaranwala, dans le district de Faisalabad. Ces violences ont éclaté après de fausses accusations de blasphème contre deux résidents chrétiens. Plus de 20 églises ont été détruites, et au moins 80 maisons ont été ravagées. La communauté chrétienne, désespérée, a vu les autorités réagir avec lenteur face à cette crise.
Impunité et absence de justice
Aujourd’hui, les chrétiens de Jaranwala vivent toujours dans la précarité. Amnesty International signale que plus de 90 % des suspects sont toujours en liberté. Sur 5 213 accusés, seuls 380 ont été arrêtés, et la plupart ont été libérés sous caution. Les procès n’ont pas commencé, laissant les victimes dans une frustration et une insécurité constantes.
Babu Ram Pant, directeur adjoint pour l’Asie du Sud à Amnesty International, dénonce l’inaction des autorités. « Un an plus tard, les agresseurs vivent librement aux côtés de leurs victimes. Le gouvernement pakistanais doit garantir justice et protéger les minorités de la discrimination et de la violence », a-t-il déclaré.
Marginalisation et peur persistantes
L’inaction des autorités a encore plus marginalisé la communauté chrétienne de Jaranwala. Beaucoup de familles n’ont reçu aucune indemnisation, malgré les promesses du gouvernement. Un rapport soumis à la Cour suprême du Pakistan en février 2024 indique que seules 85 des 146 familles recensées ont été indemnisées. La peur et l’incertitude marquent leur vie quotidienne.
Khalida Bano, une chrétienne de Jaranwala, témoigne : « Nos maisons sont en ruines, et nous n’avons reçu aucun soutien. Mon mari est au chômage depuis un an à cause de la stigmatisation. » D’autres familles partagent ce sentiment de délaissement et ont dû fuir Jaranwala pour trouver refuge ailleurs.
Deux poids, deux mesures dans le système judiciaire
Le système judiciaire pakistanais fait face à de vives critiques pour son traitement inéquitable des affaires liées aux violences de Jaranwala. Alors que les auteurs présumés circulent librement, un chrétien de 27 ans a été condamné à mort en juillet 2024 pour une vidéo blasphématoire sur TikTok. Cette condamnation rapide contraste fortement avec l’absence de poursuites contre les agresseurs, révélant un « apartheid judiciaire », selon l’évêque Azad Marshall.
L’impact des lois sur le blasphème
Les lois sur le blasphème au Pakistan continuent de persécuter les minorités religieuses, alimentant violence et discrimination. Ces lois, souvent détournées, justifient des violences collectives, comme celles de Jaranwala. Amnesty International et d’autres organisations demandent leur abrogation pour mettre fin à l’injustice.
Les attaques de Jaranwala ne sont pas un cas isolé. En mai 2024, une foule a lynché un chrétien et incendié son usine à Sargodha après des accusations de blasphème. Quelques semaines plus tard, une autre foule a brûlé vif un musulman de 36 ans dans la province de Khyber Pakhtunkhwa pour des raisons similaires. Ces incidents soulignent l’urgence de réformes juridiques pour protéger les minorités.
Un appel à la justice et à la réforme
Un an après les attaques de Jaranwala, la communauté chrétienne du Pakistan vit toujours dans la peur, sans justice. Les autorités pakistanaises doivent mener une enquête approfondie sur ces événements et punir les coupables. Il est crucial d’abroger les lois sur le blasphème, qui légitiment trop souvent la violence contre les minorités.
Sans ces réformes, les violences contre les minorités religieuses vont se perpétuer, renforçant un climat d’impunité et de peur. Le Pakistan doit protéger tous ses citoyens, indépendamment de leur foi, et garantir justice pour les crimes commis contre les plus vulnérables.